Privée de Lumière
Il y a quasiment un an et demi, j’ai rencontré un confortable appartement. Notre relation a bien débuté. Il faut dire qu’il avait tout pour plaire : 45 m² à un prix abordable, situé à moins de 10 minutes du tramway m’amenant directement à l’Université et à cinq minutes du Marché des Capucins.
Je n’ai découvert ses défauts qu’en m’y enfermant. Il fuit, il est froid, il me fatigue. Il ne me plait tout simplement plus. Lors du premier confinement, j’ai déploré son manque d’extérieur. Pourquoi n’avait-il même pas un balcon ? Pourquoi ne m’autorisait-il pas à boire un café au soleil ? J’aurais préféré être n’importe où plutôt qu’entre ses quatre murs. J’ai fini par le détester.
Je ne l’ai finalement pas quitté. Alors que je me l’étais pourtant promis, je n’ai pas déménagé. J’ai eu quelques mois pour m’excuser auprès de lui d’avoir tant rêvé d’ailleurs. Je me suis persuadée que tout allait mieux, que notre relation s’était apaisée. Et puis, j’ai dû me reconfiner. Et j’ai recommencé à le détester. Aujourd’hui, c’est son manque de lumière qui m’obsède. Pourquoi m’oblige-t-il à ne vivre qu’éclairée par la lumière artificielle ?
Parfois, j’étouffe dans mon appartement. Il faut alors que je sorte. Mais le contraste est difficile. L’extérieur est lumineux et je suis souvent éblouie. Les gens qui se croisent, le vacarme des voitures et des sons de la ville… Je fatigue vite. J’aurais voulu respirer à plein poumon, prendre le temps d’être dehors et de m’habituer à nouveau au soleil. Mais je n’ai le droit qu’à une heure, une petite heure pendant ce (re)confinement.
Il faudra bien que je rentre. Pour vivre à nouveau, privée de lumière.
Aurore VALEX
Crédits photos : Aurore VALEX